Jean-Luc Nancy: Entrez dans la danse (Entrez dans la danse)

Juvenal 2022-09-14 22:00:14

par Jean- Luc Nancy

Republished on August 24, 2021 (August 24, 2021 2:50 AM)

Film Manual Press

We are saddened to learn that Jean-Luc Nancy, a philosopher closely associated with cinema, has passed away. His other films are "Invader," the story of his heart transplant that inspired Claire Denis to make one of her best Rabah Ameur-Zaïmeche played an important role as a printer in Les chants de Mandrin ( Les chants de Mandrin ). He has written this book, "The Proof of the Film" ( L'Évidence du film , Klincksieck, 2001), for Abbas Kiarostami , and has previously written about the filmmaker for Cahier du Cinéma No. 493 's article . Our magazine also had the pleasure of publishing two of his other articles: "High Truth" (on Denis's High Life" (issue 752) and this reprint of our full text, Issue 700 is devoted to the "Dance in the Dark" passage from Vincent Minnelli 's Caravan .

Nous avons appris avec tristesse la mort de Jean-Luc Nancy, philosophe qui a entretenu des liens étroits avec le cinéma. Entre autres participations à des films, rappelons queL'Intrus, récit de sa greffe du cœur, a inspiré à Claire Denis l' un de ses meilleurs films, et qu'il jouait le rôle essentiel de l'imprimeur desChants de Mandrinde Rabah Ameur-Zaïmeche.

Il a consacré un ouvrage à Abbas Kiarostami, L'Évidence du film (Klincksieck, 2001), cinéaste sur lequel il avait précédemment écrit pour les Cahiers (n°493). La r evue a eu l'honneur de publier deux autres textes de lui: «High Truth (surHigh Lifede Claire Denis» (n°752) et ce text e que nous reproduisons dans son intégralité, consacré à la séquence «Dancing in the Dark» de Tous en scène de Vincente Minnelli, pour le numéro 700.

In Minnelli's Caravan, near the middle of the film, Fred Astaire and Cyd Charris are walking in the park together after dark. They cross the dance floor of a slow folk dance; in the next shot, they are alone on a tree-lined path that turns and leads them toward us, slightly to the left of the screen. There is a small distance between them, consistent with the plot in the film that keeps separating them, even pitting them against each other. They are all dressed in white, which contrasts sharply with the dark background of vegetation. They moved forward slowly, their steps swaying slightly, almost imperceptibly. They were silent. A loud music accompanied them like a continuous wave. When they approached the middle of the image, Charles' right foot suddenly rose above the height of a normal step during his walking pace, turning the forward movement of the step into a dance swing. The other leg followed, and Charles's step quickly turned into a pas de deux, as Astaire also circled around him and danced. The pas de deux unfolds, open and spacious, excited and restrained, graceful and harmonious, all the while continuing the walk, past a forested open space revealing illuminated skyscrapers (we're in Central Park), until the appearance A taxi-cab was waiting, with its hood open, and as the couple boarded the carriage, the dance was gathered and languished rather than abruptly stopped.

Dans Tous en scènede Minnelli, vers le milieu du film, Fred Astaire et Cyd Charisse se promènent ensemble dans un parc, à la nuit tombée. Ils traversent en marchant la piste d'un bal populaire où se danse un slow ; au plan suivant on les retrouve seuls dans une allée bordée d'arbres; un tournant de l'allée les dirige vers nous, légèrement de biais vers la gauche de l'écran. Ils gardent entre eux un léger écart, conforme à ce qui les a jusqu'ici séparés — voire opposés — dans l'intrigue du film. Ils sont tous les deux vêtus de blanc, offrant un contraste appuyé avec l'arrière-plan sombre de la végétation. balancé. Ils ne parlent pas. Une musique ample les accompagne en ondes successives. Lorsqu'ils sont à peu près au milieu de l'image, le pied droit de Cyd Charisse,dans le mouvement de sa marche, dépasse soudain la hauteur ordinaire du pas et se lève, transformant l'avancée du pas en balancement de danse. L'autre jambe va suivre, Cyd Charisse va enchaîner les premières allures de ce qui devient très vite un duo car Fred Astaire, pivotant sur lui-même, entre dans la danse. -ciel éclairés (nous sommes donc à Central Park) jusqu'à l'apparition d'un fiacre à l'attente, découvert, dans lequel le couple montera et la danse sera recueillie, alanguie plutôt que terminée.Cyd Charisse va enchaîner les premières allures de ce qui devient très vite un duo car Fred Astaire, pivotant sur lui-même, entre dans la danse. Le duo va se développer, large, spacieux, ému avec retenue, élégant, harmonieux, poursuivant la promenade en passant devant une éclaircie d'arbres qui laisse voir des gratte-ciel éclairés (nous sommes donc à Central Park) jusqu'à l'apparition d'un fiacre à l'attente, découvert, dans lequel le couple montera et la danse sera recueillie, alanguie plutôt que terminée.Cyd Charisse va enchaîner les premières allures de ce qui devient très vite un duo car Fred Astaire, pivotant sur lui-même, entre dans la danse. Le duo va se développer, large, spacieux, ému avec retenue, élégant, harmonieux, poursuivant la promenade en passant devant une éclaircie d'arbres qui laisse voir des gratte-ciel éclairés (nous sommes donc à Central Park) jusqu'à l'apparition d'un fiacre à l'attente, découvert, dans lequel le couple montera et la danse sera recueillie, alanguie plutôt que terminée.poursuivant la promenade en passant devant une éclaircie d'arbres qui laisse voir des gratte-ciel éclairés (nous sommes donc à Central Park) jusqu'à l'apparition d'un fiacre à l'attente, découvert, dans lequel le couple montera et la danse sera recueillie, alanguie plutôt que terminée.poursuivant la promenade en passant devant une éclaircie d'arbres qui laisse voir des gratte-ciel éclairés (nous sommes donc à Central Park) jusqu'à l'apparition d'un fiacre à l'attente, découvert, dans lequel le couple montera et la danse sera recueillie, alanguie plutôt que terminée.

The Band Wagon, 1953

I always watch this scene with all my troubles - at that tiny moment, one leg dances without warning: it takes the initiative and moves the entire female dancer's body. I began to think about the precise calculation of steps and distances, how the steps were arranged before the suddenness of the dance, in order to obtain a break (suddenly, there was a dance step) and a continuous simultaneity (the following was still a walk) , is the same swing magnified, but that's quite different), but there is something extraordinary art and sophistication. There is no doubt that it is precisely because of the impossibility of capturing this perfect fit in the interval, this following in the sudden change, that for me this image has all its power and allure—because in the end it is just a image, although no extraction or screenshot of any view can preserve what is essential to this trip. Even advancing image by image detracts from the glamour and the fluidity. One ends up thinking that it is not so much about the image as a void (échappée) for the image in the image. But does this escape happen on camera, with Charles, or in one person's attunement to the other? Who planned this coordination? Or: doesn't this step correspond to Gradiva's step? But what is the truth of this Pompeii dancer, if it is not about the moment of freezing, which is in its impossibility, in the distance that belongs to its approach, its course, and thus to the distance itself. in the unbearable and sweet approach?

Je ne me lasse pas de regarder cette scène — cet infime moment où sans prévenir une jambe se met à danser : c'est elle qui prend l'initiative et qui entraîne toute la danseuse. Je me prends à penser au calcul minutieux des pas et des distances, à la façon dont sont réglés les pas qui précèdent l'irruption de la danse et à l'art extraordinaire, à la finesse qu'il a fallu pour obtenir la simultanéité d'une rupture — soudain, c'est un pas de danse — et d'une continuité — c'est toujours la promenade, c'est le même balancement qui s'est amplifié et pourtant c'est tout autre. Sans doute est-ce l'impossibilité de saisir cette coïncidence parfaite dans l 'écart, ce suivi dans la mutation qui détient pour moi toute la force et tout le charme de cette image — car à la limite ce n'est qu'une image,bien qu'aucune extraction de vue ni aucune capture d'écran ne puisse retenir ce qui par essence est dans le passage. Même l'avance image par image défait le charme et dessèche la fluidité. On finit par penser qu'il s'agit moins d'image que d'une échappée à l'image dans l'image. Mais cette échappée se produit-elle dans la caméra, dans Cyd Charisse, dans l'une accordée à l'autre ? Et qui a tramé cet accord ? Ou encore : ce pas dansant ne répond-il pas à celui deGradiva? Mais quelle est la vérité de la danseuse pompéienne : n'est-ce pas celle de l'instant fixé dans son impossibilité, dans l'éloignement qui appartient à sa proximité , à son passage et par conséquent dans la proximité éprouvante et suave du lointain lui-même ?On finit par penser qu'il s'agit moins d'image que d'une échappée à l'image dans l'image. Mais cette échappée se produit-elle dans la caméra, dans Cyd Charisse, dans l'une accordée à l Et qui a tramé cet accord ? Ou encore : ce pas dansant ne répond-il pas à celui deGradiva? Mais quelle est la vérité de la danseuse pompéienne : n'est-ce pas celle de l'instant fixé dans son impossibilité , dans l'éloignement qui appartient à sa proximité, à son passage et par conséquent dans la proximité éprouvante et suave du lointain lui-même ?On finit par penser qu'il s'agit moins d'image que d'une échappée à l'image dans l'image. Mais cette échappée se produit-elle dans la caméra, dans Cyd Charisse, dans l'une accordée à l Et qui a tramé cet accord ? Ou encore : ce pas dansant ne répond-il pas à celui deGradiva? Mais quelle est la vérité de la danseuse pompéienne : n'est-ce pas celle de l'instant fixé dans son impossibilité , dans l'éloignement qui appartient à sa proximité, à son passage et par conséquent dans la proximité éprouvante et suave du lointain lui-même ?ce pas dansant ne répond-il pas à celui deGradiva? Mais quelle est la vérité de la danseuse pompéienne : n'est-ce pas celle de l'instant fixé dans son impossibilité, dans l'éloignement qui appartient à sa proximité, à son passage et par conséquent dans la proximité éprouvante et suave du lointain lui-même ?ce pas dansant ne répond-il pas à celui deGradiva? Mais quelle est la vérité de la danseuse pompéienne : n'est-ce pas celle de l'instant fixé dans son impossibilité, dans l'éloignement qui appartient à sa proximité, à son passage et par conséquent dans la proximité éprouvante et suave du lointain lui-même ?

Gradiva

To be sure, it is impossible to attribute this little miracle to my perceptions, impressions. It really happened there, on the screen, in front of me, and all the analysis could be dropped. It happened just like that. But at the same time, the fact that it is happening cannot help but trigger a huge thirst for analysis: how is this possible? Who wants it to happen? Who made it happen? Who even knew there was such a flash? Of course, a large number of fans and filmmakers know it. Maybe dancers, choreographers. However, it is well known to all that there is little to know and understand, that there is only a legacy that is always renewed, and it is best not to try to say too much about it. Not too much, just right.

Ce qui reste certain : il est impossible de ramener ce petit miracle à ma seule perception ou impression. Cela se passe vraiment là, sur l'écran, devant moi, et toute analyse doit renoncer. Cela se passe en passant. Mais en même temps , le fait que cela se passe ne peut pas ne pas déclencher une immense soif d'analyse: comment cela est-il possible ? qui l'a voulu ? qui l'a permis ? qui sait même que cette fulgurance est là ? Certainement, un grand nombre de cinéphiles et de cinéastes. Et peut-être aussi de danseurs et de chorégraphes. vaut mieux ne pas trop chercher à parler. Pas trop, juste ce qu'il faut.

See also Nancy's article "The Noble Truth" on Denis's "Life in Space" in our February 2019 issue #752 , and our issue with Nicolas Klotz in our issue #600. Klotz) and Élisabeth Perceval on The Intruder.

Retrouvez égallement l'article de Jean-Luc Nancy «High truth» surHigh Lifede Claire Denis dans notren°752 de fé vrier 2019 et sa conversation avec Nicolas Klotz et Élisabeth Perceval sur le filmL'Intrusdans notren°600.

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The Band Wagon quotes

  • Tony Hunter: [singing] How I love a glass of beer.

    Lester Marton: More beer!

    Tony Hunter: Beer goes very good with beer.

    Lester MartonLily Marton: More beer!

    Tony Hunter: When I'm drinking beer, I'm thinking, Ach, life is beer...

  • Lester Marton: Gosh, with all this raw talent around, why can't us kids get together and put on ourselves a show! Maybe, we could find ourselves a barn or something.